Glanon (Saint Rémy-de-Provence, Bouches-du-Rhône)
Le site établi sur le versant nord des Alpilles est occupé depuis l'Âge du bronze[1]. Une agglomération indigène s'y installe à partir du VIe siècle et se développe à partir du vallon de Notre-Dame. Elle occupe tout d'abord les versants avant de déborder très largement à la fin de l'Âge du fer sur le piémont. Un rempart protège alors sur 20 ha le vallon et les collines avoisinantes. C'est le captage des eaux de ruissellement dans le vallon Notre-Dame qui est perçu comme la raison d'être de ce site. Les fouilles mettent en évidence la séparation, dès le premier Âge du fer, entre le secteur de la source, limité par la « porte charretière »
, et le reste de l'agglomération. Vers 100 avant J.-C., un second rempart double du côté nord la superficie du site. Au IIe siècle avant J.-C, Glanon fait l'objet d'un programme urbanistique et monumental important, hellénisé, mais la culture indigène n'est pas pour autant oubliée. La ville est détruite à deux reprises pendant les campagnes de la conquête romaine en pays salyen[2] (125-122 et 90 avant J.-C). Deux secteurs sont donc distincts :
Le secteur de la
« source »
lieu d'un culte poliade[3]. C'est le noyau originel de l'occupation qui est situé dans la zone du vallon Notre-Dame. L'accès à cet espace est protégé au sein même de l'agglomération de l'Âge du Fer, par un rempart barrant ce vallon. Il faut attendre le IIe siècle pour que ce secteur connaisse une dimension monumentale avec la construction d'un nymphée[4]. Il doit y avoir un culte en l'honneur de Glan ou Glanis -le« pur »
ou« limpide »
- le dieu de la cité. On a retrouvé également un autel en calcaire tendre et écrit en gallo-grec en l'honneur des Mères Glaniques[5] daté du Ier siècle avant J.-C. Les aménagements de la période romaine ne font que confirmer la vocation religieuse de ce site. On retrouve des autels en l'honneur des Mères Glaniques et d'Hercule[6]. Ce secteur du sanctuaire des eaux joue un rôle dans l'urbanisation de Glanon, et à partir du IIe siècle se développe un second pôle.Le centre monumental. Avant sa construction, au IIe siècle avant J.-C, la
« porte charretière »
marque une division. C'est un passage fortifié, ses fondations et le parement des murs (de la seconde moitié du VIe siècle au IIe siècle avant J.-C) remploient de nombreuses stèles lisses, à décor zoomorphe ou anthropomorphes et des fragments de piliers peints. La pratique de l'exposition des crânes humains se poursuit au IIe siècle sous une autre forme. On a retrouvé un enclouage de crânes humains au niveau du portique intérieur d'un vaste édifice trapézoïdal interprété comme le prytanée[7]. Enfin, Glanon présente le seul cas de statues de guerriers assis en tailleur. C'est entre le rempart et un édifice à gradins qu'a été préservé ce dispositif qui, à la fin du IIe-Ier siècle avant J.-C. se comprend dans le cadre d'un culte de guerriers héroïsés, identifiant alors l'aménagement comme un hérôon[8]. Ces personnages ont probablement une dimension politico-mythologique en relation avec la vie publique de l'agglomération. Ils se trouvent à proximité d'un bâtiment à gradins appelé bouleutérion[9]. Les différentes expressions rituelles prennent donc place au sein d'un centre monumental composé du prytanée, d'un édifice à gradins -le bouleutérion-, de l'hérôon, sans oublier le temple sur podium d'ordre toscan construit également au IIe siècle.
Glanon aux IIe-Ier siècles avant J.-C offre ainsi une situation bipolaire avec un lieu de culte lié à une source et monumentalisé et un centre politico-religieux situé hors des murs. Glanon est peut-être poleis Massalias[10]. Toutefois, elle garde sa culture indigène dans le domaine des pratiques cultuelles (exposition des crânes dans des portiques, statues de guerriers héroïsés) tout en développant une monumentalisation importante.