Religions et Argent

Conclusion : les difficultés de la représentation

L'intégration du culte islamique parmi les bénéficiaires des systèmes de financement public dans les différents États européens ne s'opère pas sans difficulté. Longtemps regardée avec réticence par des autorités qui tardaient à reconnaitre à l'islam le caractère d'une religion indigène, le financement du culte islamique est aujourd'hui soutenu car considéré comme un instrument de prévention du radicalisme violent. Toutefois, les systèmes européens ayant été conçus pour des Églises fortement hiérarchisées, ces démarches se heurtent à la difficulté d'identifier des organes représentatifs de l'islam européen. Il n'est pas simple de déterminer une seule organisation représentative pour des populations musulmanes d'origines nationales ou de traditions religieuses différentes, et les États sont souvent amenés à faire le choix de la diversité. C'est ainsi que l'Autriche a reconnu trois communautés religieuses islamiques (la Communauté confessionnelle islamique, la Communauté confessionnelle islamique chiite et la Communauté confessionnelle Islamique alévie). En Allemagne également, la communauté des Alevis est structurée à côté du Conseil central des musulmans en Allemagne. D'autres États tentent d'obtenir un organe représentatif des différentes composantes de l'islam dans le pays ; ainsi des tentatives de la Belgique de réserver des sièges au sein de l'Exécutif des Musulmans aux « Belgo-Turcs », « Belgo-Marocains », « Belges convertis » et « autres ». Contrairement à la Belgique, les États fédéraux voient le plus souvent une organisation se développer dans chacune des entités fédérées. C'est le cas en Espagne par exemple.

Identifier un interlocuteur représentatif se révèle particulièrement difficile pour les États appliquant une stricte séparation de l'Église et de l'État. La France cherche de longue date à disposer d'un interlocuteur représentatif pour l'islam. Un Conseil français du culte musulman, association régie par la loi de 1901, a été créé en 2003 avec pour objectif de représenter les musulmans de France auprès des autorités pour les questions relatives à la pratique religieuse. Cela ne résout pas la problématique du financement de l'islam, ainsi que le souligne le rapport de la mission d'information sur l'organisation, la place et le financement de l'Islam en France et de ses lieux de culte déposé au Sénat en juillet 2016. Le gouvernement français a soutenu la création d'une Fondation de l'islam de France, instituée par décret en décembre 2016 et reconnue comme établissement d'utilité publique. La Fondation soutient des projets éducatifs, culturels et sociaux, mais n'a pas de rôle religieux, dans le respect des principes de la laïcité.

À travers la question de la représentation du culte, mais également à la faveur de la création d'écoles confessionnelles islamiques, les États européens sont amenés à questionner la pertinence de systèmes d'organisation des cultes dont les fondements remontent souvent à la fondation des États modernes au XIXe siècle.

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