Survol historique et droit de la femme à l'éducation et au travail
Enseigner aux femmes dans la Chrétienté latine
Des clercs du IVe siècle interdisent aux femmes la parole et l'enseignement dans les célébrations ; Au IIe siècle de l'ère chrétienne, des femmes enseignent, disputent, exorcisent, promettent des guérisons et vont jusqu'à baptiser, Tertullien[1] , dénonce dans ces faits une impudence qu'il faut condamner. Deux siècles plus tard, Jean Chrysostome[2] entend contenir le rôle d'enseignement des femmes dans le strict cadre du foyer. Mais cela ne signifie pas une absence d'éducation lettrée. La correspondance de son contemporain, Jérôme de Stridon[3] , à une certaine Laeta concernant l'éducation de sa fille, montre qu'il conseille non seulement de lui faire apprendre des compétences utiles telles que le tissage et la couture, mais également la lecture et l'écriture, et l'apprentissage de la langue latine pour comprendre la Bible. Toutefois, l'enseignement poussé, nécessaire aux garçons, est considéré comme inutile pour les filles.
Au Moyen-âge, l'Église se réserve le monopole de l'enseignement, et la plupart de l'enseignement dispensé aux filles se donne dans les couvents, notamment à des filles ou femmes aristocrates, et à quelques religieuses. L'historienne Régine Pernoud examine cette question dans son ouvrage La femme au temps des cathédrales (1980). Elle écrit que, sous le régime féodal, filles et garçons reçoivent le même enseignement. Mais, avec l'avènement des nouvelles universités, les femmes sont exclues du système et le domaine académique devient ainsi l'apanage des hommes. Rares sont les femmes qui jouissent d'un niveau d'enseignement avancé comme l'abbesse Héloïse[4] qui enseigne à ses moniales le Grec et l'Hébreu classiques. Ce tableau général laisse apparaître des cas de reines ou régentes jouant un rôle majeur, ainsi que des commerçantes.
Enseigner aux femmes dans l'Islam des premiers siècles
Au sud de la Méditerranée, des femmes ont pu exercer une activité d'autorité durant l'Antiquité, notamment dans l’Égypte pharaonique. Il n'y a pas d'équivalent plus à l'est, dans la péninsule arabique. Mais, pour la fin du VIe et au début du VIIe siècle, des écrits de langue arabe postérieurs font valoir l'existence de femmes poétesses, comme al-Khansâ[5] , ou commerçante, comme Khadîjâ[6] , première épouse du prophète de l'islam. Cependant, d'autres auteurs soulignent le fait que, avant l'avènement de l'islam, la naissance d'une fille pouvait être considérée comme honteuse et que certains parents les enterraient vivantes. Les femmes pouvaient également faire partie du butin de guerre.
La tradition sunnite a valorisé tout particulièrement Aïsha[7] , une des femmes du prophète de l'islam. Selon ces auteurs, elle discute d'affaires politiques avec Muhammad qui reconnaissait expressément sa sagesse. Elle fait partie du petit nombre de personnes qui transmettent les paroles et les récits de geste de son mari défunt. Elle prend la direction d'une armée de plusieurs milliers d'hommes et exerce la fonction de soignante pour les blessés, ce qui est présenté comme un exemple à suivre. Parmi les autres personnalités féminines en vue se trouve Sukie'na, nièce de Muhammad, considérée comme une mathématicienne réputée. A la même époque, Les Mille et une nuits, recueil de contes arabes traduits du persan au VIIIe ou au IXe siècle, mettent en scène une esclave qui maîtrise plusieurs disciplines dont les sciences, la grammaire, la poésie, les mathématiques, et la philosophie, ce qui lui permet d'engager des discussions avec les érudits, mais également une sultane qui dispose d'une forte autorité. Au cours des siècles ultérieurs, les écoles qui enseignent le Coran sont généralement fréquentées par des garçons.. Dans l'aristocratie, cependant, des filles reçoivent des rudiments de sciences religieuses, comme leurs frères. Elles peuvent apprendre le chant et la composition de vers mystiques dans les langues perse et ottomane-turque. En Perse, il existe quelques écoles mixtes, des poétesses, des chanteuses et des compositrices.