Conclusion
Observé à différentes échelles et de différents points de vue, cet épisode mystique des stigmatisées des années 1870-1930 prend des sens différents. Il relève à la fois d'une forme d'émancipation féminine face aux autorités qui veulent contrôler les signes, de l'émergence d'une nouvelle spiritualité laïque dans des milieux modestes, de la construction d'un collectif soutenu à distance par la médiatisation moderne stimulée par l'éclosion de controverses scientifiques accessible au grand public, de l'expression enfin d'une angoisse de tout un peuple de fidèles. Dans toutes ses dimensions, cet épisode mystique relève du politique, qu'il se fasse porte-voix du légitimisme, élément d'un conflit ecclésiastique local, ou qu'il fasse écho à de plus vastes confrontations sur fond d'anticléricalisme. Les stigmatisées témoins privilégiées du mystère de la Rédemption sont devenues des médias politiques et à l'évidence, les stigmates ont de plus en plus pour fonction unique de fournir une preuve de l'authenticité du message délivré. Ceux qui les regardent – et le masculin n'est pas anodin - médecins, psys, clercs – sont logiquement clivés selon la valeur qu'ils accordent à cette expérience individuelle mais aussi selon leur position politique dans l’Église et dans l'espace social.
