Mohammed Abed El Jabiri : pour un nouveau rapport au temps
L'analyse d'El Jabiri repose sur trois niveaux liés à des axes temporels bien définis : le passé, le présent et le futur.
La première question est celle qui fonde le salafisme[1] : Comment peut-on récupérer la gloire de notre civilisation et comment peut-on faire renaître notre patrimoine ? Il s'agit, explique El Jabiri, d'un dialogue entre le passé et l'avenir où le présent est absent puisqu'il est récusé et le passé est omniprésent puisqu'il s'étale dans le futur. La deuxième question reprend celle du salafisme orientaliste : Comment doit-on vivre à notre époque et quel traitement réserver à notre patrimoine ? Le débat est ici entre le présent et le passé. Ceux qui le mènent parlent d'un présent qui n'est pas le leur mais celui de l' « Occident » comme entité actuelle de toute l'humanité. La troisième question habite la pensée qualifiée de « gauchiste » : Comment concevoir notre révolution et comment pourrait-on réédifier notre patrimoine? La relation s'établit, dans ce cas, entre le passé et le futur, car la révolution doit reformer le patrimoine et celui-ci doit contribuer à fonder la révolution. L'importance de cette approche, selon El Jabiri, réside dans la conception dynamique ou évolutive du patrimoine.
Afin de surmonter ces tensions, El Jabiri propose d'établir une nouvelle relation entre le passé (l'absent) et le présent (le témoin) : « l'absent » doit constituer une solution pour « le témoin », l'un et l'autre ayant des points en commun qu'il faut étudier. L'approche ne doit pas dépendre d'une conception mécanique du temps (comme si l'histoire fonctionnait logiquement), ni d'une suspension du temps (comme si l'histoire n'existait pas).