Le mysticisme dans l'œuvre de l'écrivaine française Marie Noël (1883-1967)

De la joie à la peine

La première phase de sa carrière littéraire ouvre à Marie Noël les portes du grand public religieux. Sa poésie fait partie des anthologies, mais aussi des revues et journaux paroissiaux et scolaires. Nombre d'écoliers de collège ont appris ses poèmes, aux allures de chansonnettes, par cœur.

Après la Deuxième Guerre mondiale, débute la deuxième époque de la carrière littéraire, plus sombre. Les textes dévoilent une âme sans cesse déchirée entre la joie de vivre et la douleur de la solitude, de la déréliction et de la tristesse. Parfois, même, l'impératif d'espérance, vertu théologale[1] pour les catholiques, semble absent. Parmi les nombreux Chants d'arrière-saison que l'on pourrait citer, le Chant de la peine est peut-être le plus parlant.

Avec les Notes intimes, c'est la prose cette fois qui rend compte des tourments de la foi. Dans la préface, l'auteure précise que « ce n'est pas une lecture pour tous ». Le texte est constitué de morceaux choisis issus de ses souvenirs, ou de notes prises d'une manière aléatoire au gré de son inspiration. Tantôt joyeux, drôles et légers, tantôt graves et plus érudits, ils racontent l'amertume de l'auteur, ses doutes, ses déceptions, ses déchirements, et décrivent les phases dépressives de sa vie. Elle s'y montre obsédée par le mal et la souffrance. Avec une parfaite transparence, elle exprime la difficulté qu'elle éprouve à communiquer avec Dieu.

Cette œuvre vient à point nommé pour nourrir la littérature de témoignage qui s’emboîte parfaitement avec l'évangélisation par les témoins que l’Église appelle alors de ses vœux. Elle participe également – mais sans doute de manière plus involontaire – à une libération de la parole féminine qui se manifeste par le nombre accru de récits autobiographiques écrits par les premières femmes mieux dotées en capital scolaire, les premières « intellectuelles » en quelque sorte, à la même période. Les écrits de Marie Noël rencontrent un succès indéniable, essentiellement auprès du public catholique. Indice de cette diffusion, Les Notes intimes sont traduites et publiées en italien, allemand, portugais et anglais (américain).

  1. vertu théologale

    Selon la théologie catholique, les vertus théologales doivent guider les hommes dans leur rapport au monde et à Dieu. Elles sont au nombre de trois : la foi, l'espérance et la charité.

PrécédentPrécédentSuivantSuivant
AccueilAccueilImprimerImprimer Cécile Vanderpelen - Université Libre de Bruxelles (Belgique) Paternité - Pas d'Utilisation Commerciale - Pas de ModificationRéalisé avec Scenari (nouvelle fenêtre)