Eléments de tradition picturale de l'église maronite de Behdidât au XIIIe siècle

Débats d'interprétation

Les peintures murales et pariétales de cette région se présentent comme une synthèse entre deux traditions : byzantine et syriaque. Si la thématique reste sous l'influence byzantine, et la tradition est syriaque, le style artistique quant à lui fait partie d'une typologie identificatoire qui se caractérise par les traits suivants :

  • Des figures dépourvues de volume.

  • Un agencement sobre, rigide, majestueux et d'une raideur solennelle.

  • Des contours dessinés par une simple ligne noire épaisse.

  • Des couleurs uniformes, de nuance et d'intensités égales. Elles ne créent pas de relief et se limitent à remplir les surfaces vides

  • Des poses immobiles, frontales, de confrontation.

  • Des draperies raides, sans fluidité.

  • Des visages stéréotypés, à la forme ovale.

  • Des yeux largement ouverts, aux regards figés dans l'éternité, à la forme en amande. Des nez et des bouches identiques. Des sourcils rattachés aux deux lignes qui constituent le nez.

représentation du Christ © Charles Chémaly

Une note d'éclaircissement est nécessaire sur les prétentions de Charles Diehl qui, lors d'une communication pour l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres Séances en 1927, prétendait que dans l'église Saint-Théodore de Behdidât se trouvait une grande composition représentant la Dormition de la Vierge. En réalité, l'étude qu'il avait effectuée se fondait sur les relevés en aquarelle réalisés par Tutundjian à la demande de M. Virolleaud. Deux hypothèses sont possibles. La première est que Diehl a confondu avec le programme pictural de l'église Mâr-Charbel du village de Ma‘âd, où la Dormition de la Vierge se trouve dans la chambre funéraire, à l'angle sud-est de l'édifice. La seconde conduit à l'idée de l'existence d'une couche détruite pour dégager le programme actuel. Mais l'examen de parois peintes de l'église Saint-Théodore à Behdidât ne donne aucune indication tangible permettant d'étayer cette réponse.

Aucune recherche scientifique n'a été entreprise pour identifier la date exacte de ces œuvres. Les chercheurs se contentent de proposer une attribution au milieu ou durant le troisième quart du XIIIe siècle. La peinture murale de l'église Saint-Théodore à Behdidât confirme le style local des œuvres. Il est lié à la tradition des monastères reculés de la région de Syrie (région de Qalamoun) et de l'Irak et entretient des éléments de familiarité avec l'art musulman. À Behdidât, ce style local se traduit par une cohérence esthétique : la fraîcheur des couleurs malgré le verni brun, le soin apporté aux motifs décoratifs, architectoniques, pour les vêtements des personnages. Ce style affiche un aplatissement des volumes avec des traits du visage strictement linéaires et des tonalités de couleurs très limitées. Cette démarche stylistique souligne le travail d'un seul maître, « le maître de Behdidât » ou d'un seul atelier, auquel sont également attribuées les peintures murales de l'église de Mâr Charbel de M'âd et la peinture de la chapelle rupestre de Mârt Shemuni, dans une grotte dans la région de Hadchit- Liban Nord.

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