Une ville-carrefour
Antioche, sur l'Oronte, est fondée en 300 av. J.C. par Séleucos Ier Nicator[1] en souvenir de son père Antiochos[2] et devient la capitale du royaume des Séleucides. Elle tombe sous la domination romaine en 64 av. J.-C., et reste la capitale de l'Orient jusqu'à la fondation de Constantinople en 330. Elle occupe le troisième rang parmi les villes de l'Antiquité, immédiatement après Rome et Alexandrie. Sa population compte 500 000 personnes. Elle est cosmopolite : Grecs, Syriaques, Juifs et autres vivent ensemble. Tous ces peuples présents dans la métropole ont leurs religions, leurs cultes et leurs temples. La ville abrite des monuments publics somptueux : palais, écoles, hippodromes, théâtres, thermes, bibliothèques... Elle ne cesse de croître et englobe ses faubourgs. Elle tire son importance de l'ascendance qu'elle exerce sur une vaste région à la fois urbaine et rurale comprise entre l'Amanus et le Sinaï, l'Euphrate et la Méditerranée. L'étendue de cette région augmente ou diminue au gré de dispositions administratives et des guerres engagées principalement avec les Perses. Cependant le comté d'Orient dont Antioche est la capitale regroupe 8 provinces : Palestine, Phénicie, Syrie, Arabie, Mésopotamie, Cilicie, Isaurie et Chypre. Elle constitue la plateforme du patriarcat[3] d'Antioche dans la mesure où la géographie ecclésiastique se calque sur le découpage administratif civil. Ainsi le titre de tout l'Orient que portent les patriarches d'Antioche de tous les rites orientaux traduit la juridiction patriarcale sur ces provinces qui regroupent environ 100 évêchés au début du IVe siècle.
Ville singulière dans l'Antiquité tardive, Antioche est un foyer culturel hellénistique dont le rayonnement dépasse les frontières naturelles de la province qu'elle domine. Elle est un centre commercial qui pratique l'échange à grande échelle avec le golfe persique, la Méditerranée et leurs prolongements. A l'exemple de Rome, elle est un point de convergence de nombreux courants de pensée et de modes. Libanius[4] y fait une carrière de rhéteur et de sophiste[5] illustre. Sa population aime les jeux et les festivités exubérantes. Comme capitale, Antioche dispose d'énormes pouvoirs d'ordre politique, économique et militaire et étend son influence sur un immense réseau de villes : Edesse, Samosate, Apamée, Emèse, Laodicée, Damas Beyrouth, Sidon, Tyr, Ptolémaïs. Conscients de ces atouts, certains empereurs tels que Trajan[6] et Constantin[7] y laissent leurs marques en élevant des édifices. D'autres choisissent d'y résider. Julien[8] s'y installe en 361, Valens[9] entre 371-378. Tous deux essayent de comprimer sa population selon un dessein particulier, mais ils échouent et rencontrent même un sort funeste. Antioche périclite lorsqu'elle tombe entre les mains des Arabes en 638.