Religions et Argent

Protestantisme libéral et anticatholicisme

De famille protestante, Max Weber est proche des milieux intellectuels qui repensent la théologie en Allemagne. Il est notamment cousin du professeur de théologie Otto Baumgarten[1] et ami du philosophe et théologien Ernest Troeltsch[2], avec qui il visite l'Amérique en 1904. Il se rapproche dès son jeune âge des milieux du protestantisme libéral qui développe une théologie rationaliste, détachée de l'orthodoxie dogmatique et de la tradition des Églises réformées, valorisant la démarche scientifique et l'adaptation de la théologie chrétienne en contexte de modernité. Cette théologie adopte, globalement, les idées de progrès et de civilisation propre à l'Europe d'alors et les lie au devenir du christianisme.

Dans ce milieu, le lien entre protestantisme et développement économique est une évidence. Ce n'est donc en aucun cas une invention de Max Weber. Plus largement, les protestants allemands du XIXe siècle, comme les protestants suisses, français et nord-américains sont convaincus que les terres de protestantisme sont plus développées que tous les autres territoires, à commencer par les territoires catholiques. Les études sur l'anticatholicisme (cf. bibliographie) en témoignent largement. Certains chiffres du développement économique et de l'industrialisation corroborent cette thèse mais il faut compter avec de nombreux facteurs, notamment la question ville/campagne, l'éducation et la formation, ou encore l'accès ou non au commerce maritime, pour ne prendre que quelques exemples. Nous reprendrons cette question dans la quatrième et dernière partie, pour le moment, retenons que le protestantisme du XIXe siècle est, dans son identité, tout à la fois foncièrement attaché aux idées de développement et profondément anticatholique. Weber n'invente donc pas cette corrélation. Dans les représentations du monde des protestants du XIXe siècle, la Réforme et le protestantisme sont associés au progrès, le catholicisme au « retard de civilisation ». La papauté est présentée comme une institution du Moyen Age dont les manières de faire seraient restées ancrées dans le passé. Max Weber hérite de ce schéma d'interprétation du monde et cherche à comprendre son fonctionnement mais sans en remettre complètement en cause les présupposés.

  1. Otto Baumgarten

    Otto Baumgarten (1858-1934) est professeur de théologie aux Universités de Iéna et Kiel.

  2. Ernest Troeltsch

    Ernest Troeltsch (1865-1923) est un philosophe, théologien, historien et sociologue allemand. Il est professeur dans différentes universités (Bonn, Heidelberg, Berlin) et s'engage aussi en politique.

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