Révocation de l’Edit de Nantes. – En 1598, Henri IV avait signé à Nantes un édit qui
permettait aux protestants de France de pratiquer leur religion. En 1685, son petit-fils, Louis
XIV, révoqua cet édit. Les protestants furent effroyablement persécutés dans toute la France.
Malgré la défense qui leur en était faite, des milliers d’entre eux quittèrent ce pays et se
rendirent en Angleterre, en Prusse, en Suisse et ailleurs.
A Genève, Louis XIV avait depuis quelques années établi un résident. Ce représentant du
grand roi était surtout chargé de recevoir le courrier du gouvernement français et de le
réexpédier en Suisse et en Italie ; mais il avait aussi pour mission de surveiller les Genevois et
d’exercer une pression sur les Conseils afin qu’ils ne fissent rien de contraire aux intérêts de
la France. Genève, comme d’ailleurs les cantons suisses et les différents pays de l’Europe,
subissait l’ascendant de Louis XIV qui était devenu le plus puissant des monarques de ce
temps. Aussi, lorsque les malheureux réfugiés se présentaient aux portes de la cité, on n’osait
plus les recevoir comme on le faisait depuis tant d’années, de peur de déplaire au roi-soleil.
On les faisait passer ailleurs, dans les cantons suisses, en leur donnant, en secret, des secours.
Cependant, beaucoup de ces malheureux restaient dans la ville ; d’autres y revenaient, et la
population s’accrut considérablement.
Au début les réfugiés furent traités comme des frères. Mais peu à peu le peuple vit en eux
des rivaux, car les nouveaux venus étaient généralement des gens industrieux, vivant
modestement et se contentant de salaires modiques ; ils faisaient aux ouvriers du pays, moins
endurants, une concurrence redoutable. A la demande des bourgeois, les Conseil furent
obligés de prendre contre eux des mesures vexatoires ; on employait tous les moyens pour les
empêcher de devenir bourgeois et les forcer de quitter la ville. Cependant beaucoup restèrent ;
leurs descendants formèrent une nouvelle classe, celle des Natifs, qui joua plus tard un rôle
important dans l’histoire de la République [c’est-à-dire qu’ils furent parmi les meneurs des
Révolutions démocratiques]. »