Scholem et l'innovation traditionnelle

« Ce qui favorise surtout la naissance de la mystique, c'est une situation, dans laquelle ces nouvelles impulsions ne brisent pas la coque de l'ancien système religieux pour en créer un nouveau, mais tendent à rester confiner à l'intérieur de ses limites. Dans l'éventualité d'une telle situation, le besoin de nouvelles valeurs religieuses correspondant à une nouvelle expérience religieuse trouve sont expression dans une interprétation nouvelle des valeurs anciennes ; celles-ci acquièrent fréquemment une signification personnelle beaucoup plus profonde, bien qu'elles puissent différer souvent des anciennes et transformer leur sens. [...] Il n'est guère surprenant, si vigoureusement que le mystique essaye de rester dans les bornes de sa religion, qu'il approche souvent, consciemment ou inconsciemment, de ses limites, ou même qu'il les transgresse. [...] Il n'est pas nécessaire que je m'étende sur les raisons qui ont souvent transformé les mystiques en hérétiques. La communauté religieuse n'a pas toujours combattu par le feu et l'épée une telle hérésie : il peut même arriver que sa nature hérétique ne soit pas comprise ou reconnue. C'est particulièrement le cas où le mystique parvient à s'adapter au vocabulaire “orthodoxe” et l'emploie comme un support ou un véhicule pour ses pensées. Pratiquement, c'est ce que beaucoup de kabbalistes ont fait. »

Source : SCHOLEM, Les grands courants, op. cit., pp. 21-22.

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