La femme, être déficient mais nécessaire

THOMAS D'AQUIN, Somme de théologie, Première partie, question 92 « la production de la femme », article 1 « La production des choses devait-elle comporter la production de la femme ? »

Dans ce texte rédigé entre 1265 et 1269 (et qui demeure parmi les grands classiques de la théologie catholique romaine) Thomas se fonde sur le verset de Genèse 2, 18 (« Il n'est pas bon que l'homme soit seul ; faisons-lui une aide qui lui soit assortie »), pour conclure que la création de la femme était nécessaire pour aider l'homme, non pas dans son travail mais dans l'œuvre de la génération. Comme il le fait de manière systématique, il commence par énoncer des objections à sa thèse, dont la première est ici citée, puis des solutions à ces objections, dont la première est également citée. On voit qu'il ne remet pas fondamentalement en question la conception aristotélicienne de la femelle comme être déficient (en tant qu'individu), mais que la femme exerce de façon générale une fonction nécessaire à la procréation, et qu'elle n'est donc pas, sous ce rapport, une erreur de la création.

Objection 1 : Aristote dit : « La femelle est un mâle manqué, produit par le hasard. Mais rien de manqué ni de défectueux ne devait se trouver dans la première institution des choses.

(...)

Solution 1 : Par rapport à la nature particulière, la femme est quelque chose de défectueux et de manqué. Car la vertu active qui se trouve dans la semence du mâle vise à produire quelque chose qui lui soit semblable en perfection selon le sexe masculin. Mais si une femme est engendrée, cela résulte d'une faiblesse de la vertu active, ou de quelque mauvaise disposition de la matière, ou encore de quelque transmutation venue du dehors, par exemple des vents du sud qui sont humides, comme dit Aristote. Mais rattachée à la nature universelle, la femme n'est pas un être manqué : par l'intention de la nature, elle est ordonnée à l'œuvre de la génération. Or, l'intention de la nature universelle dépend de Dieu, qui est l'auteur universel de la nature, et c'est pourquoi, en instituant la nature, il produisit non seulement l'homme, mais aussi la femme.

Référence : THOMAS D'AQUIN, Somme théologique, tome 1, Paris, Cerf, 1984, p. 789-790.

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