Eau et sacré dans le Maghreb antique (époque romaine)

Introduction

Durant l'Antiquité, l'eau est au centre des préoccupations religieuses des Africains du nord : pluies, sources et fleuves sont investis d'une valeur sacrée, valeur d'autant plus grande que le Maghreb antique est avant tout une région peuplée de paysans et de pasteurs pour qui la fertilité des moissons et la fécondité des troupeaux sont les plus précieux des dons divins. Le caractère sacré de ces eaux est rattaché dans leur esprit à la présence tutélaire d'une force à laquelle ils donnent le nom de génie[1] ou de divinité. Ce qui fait que cette eau sacrée reflète un sentiment de crainte d'une réalité surnaturelle qui dépasse leurs connaissances et leurs conceptions. Bien qu'il soit difficile de définir les croyances relatives à l'eau dans les périodes antérieures, faute de documents, on pourrait dire qu'un fonds religieux proprement libyen a existé. Il s'agit de génies locaux des eaux qui sont supplantés probablement par les dieux romains, en l'occurrence Neptune[2] et les nymphes[3] dans les régions imprégnées par la civilisation romaine.

Carte de l'Afrique romaine © SA, CERHIO
  1. Génie

    Cette figure relève, selon G.ch.Picard, « d'une évolution du sacré qui personnalise le ‘génie' mais en lui laissant encore un caractère vague, moins riche que celui d'un dieu ». Les Romains font du genius la divinité tutélaire tant des personnes que des lieux. C'est ce qu'atteste Servius (ad.Georg.I, 302) : « Les anciens disaient que le genius est un dieu naturel de chaque lieu, de chaque chose et de chaque homme ». Les génies occupent une place centrale dans les croyances traditionnelles aux pays du Maghreb, surtout aux bords des fleuves et à proximités des sources.

  2. Neptune (ou Poséidon)

    Dans la mythologie romaine, Neptune est dieu des eaux vives et des sources. Il est assimilé au dieu des océans de la mythologie grecque, Poséidon. En conséquence, Neptune prend une grande partie des caractéristiques et attributs de Poséidon. Pourtant, Neptune est à l'origine une divinité de conception latine. Sa transformation en maître des océans correspond à une période où la puissance romaine commence à se tourner vers le contrôle des voies maritimes de la méditerranée : les Latins ont su transformer une ancienne divinité des eaux douces en dieu des mers, en adéquation avec les mutations de leurs civilisation.

  3. Nymphe

    Terme emprunté du latin nympha et du grec numphê, il signifie « jeunes mariées ». Divinités féminines secondaires qui habitent les fleuves, les bois, les sources, les fontaines, les prairies et les montagnes. Bien qu'occupant dans la hiérarchie divine un rang inférieur, elles sont cependant, à l'occasion, admises dans l'Olympe et sont honorées chez les mortels d'un culte religieux. Leurs attributions sont multiples : elles ont le don de prophétie et rendent des oracles ; divinités bienveillantes elles guérissent les malades et veillent sur les fleurs, les prairies et les troupeaux. Généralement bienveillantes, elles peuvent devenir dangereuses pour les mortels, jusqu'à entraîner leur victime au fond des eaux.

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