Défense des images figurées pour la piété des fidèles

Puisque certains nous reprochent de vénérer et d’honorer l’image (eikôn) de Notre Sauveur, de Notre Souveraine et des autres saints et serviteurs du Christ, qu’ils apprennent qu’au commencement Dieu a créé l’homme à son image (cf. Gn 1, 27). Pourquoi donc nous rendons-nous hommage les uns les autres, par des prosternations, si ce n’est parce que nous sommes créés à l’image de Dieu ? En effet, comme dit le théophore Basile, très sage dans la science du divin, « l’honneur rendu à l’image remonte au prototype » (cf. Basile de Césarée, De Spiritu Sancto, 45, SC 17bis, 406). Le prototype (prôtotypon), c’est ce qui est représenté, ce dont on fait le dérivé (paragôgon) [ou la reproduction].
D’ailleurs, qui serait en mesure de fabriquer une imitation (mimèma) du Dieu invisible, incorporel, indescriptible et sans figure ? C’est folie extrême et irrespect, que figurer le divin. Aussi l’usage des images n’était-il pas fréquent dans l’Ancien Testament. Cependant, puisque Dieu est devenu véritablement homme des profondeurs de sa miséricorde pour notre salut, il ne nous est pas apparu sous une figure humaine, comme à Abraham (cf. Gn 18, 2) ou aux prophètes, mais il est devenu véritablement homme selon l’essence. Il a séjourné sur terre, « il a vécu parmi les hommes » (Ba 3, 38), il a opéré des miracles, il a souffert, il a été crucifié, il est ressuscité, il est monté au ciel. Et comme tous ces événements se sont véritablement produits, et ont été vus par des hommes, ils ont été mis par écrit pour notre souvenir et pour l’instruction de ceux qui n’étaient pas là en ce temps […]. Mais comme tout le monde ne sait pas lire et ne consacre pas sa vie à la lecture, les Pères ont compris que pour se rappeler rapidement ces événements, il fallait aussi les reproduire par des images, comme on fait pour divers exploits. Ainsi, dans des moments où nous ne pensons pas à la Passion du Seigneur, il nous arrive souvent de nous souvenir de la Passion salvatrice en voyant l’image de la crucifixion du Christ. Alors, tombant à terre, nous ne vénérons pas la matière, mais le sujet représenté […]. Mais cette tradition n’est pas écrite (agraphos), comme celle de l’adoration vers l’Orient, de la vénération de la croix et de plusieurs autres pratiques semblables.