Jacques Hamel, “curé de campagne“ et martyr
Le père Jacques Hamel a été égorgé ce mardi 26 juillet au matin dans une attaque revendiquée par Daech, alors qu’il célébrait la messe en l’église Saint-Étienne de Saint-Etienne-du-Rouvray (Seine-Maritime), où il officiait depuis 15 ans.
« Discret, plutôt silencieux mais très bienveillant » : c’est ainsi que le père Jacques Hamel restera dans la mémoire du père Auguste Moanda, curé de la paroisse de Saint-Étienne-du-Rouvray. Apprécié des habitants, très actif au sein de la paroisse, ce prêtre de 85 ans animait un groupe de parole sur la foi et donnait des cours de catéchisme jusqu’à l’an dernier. « Il répondait présent à toutes les demandes et secondait beaucoup le père Auguste. Il vivait pour sa foi et pour les autres », raconte Linda Dupré, permanente locale de la paroisse de Saint-Étienne, qui se rappelle aussi : « Lorsque des réunions s’éternisaient, il avait toujours le mot pour nous faire rire. »
Né en 1930 à Darnétal, Jacques Hamel a été ordonné prêtre en 1958. En 2008, il a ainsi fêté son jubilé d’or (cinquante ans de sacerdoce) : « Après la messe, nous avions partagé un repas. Il était très joyeux », se remémore une fidèle. L’abbé avait essentiellement officié en paroisse, notamment à Saint-Antoine-du-Petit- Quevilly et à Saint-Pierre-lès-Elbeuf, en Seine-Maritime. D’un naturel travailleur et consciencieux, « courageux » même, le prêtre était connu dans le diocèse de Rouen pour avoir refusé de prendre sa retraite à 75 ans, « pour rester au service de la communauté en disant la messe et en donnant les sacrements ». Sensible au manque de prêtres dans les campagnes, « il prenait très au sérieux l’évangile et mettait tout son coeur au travail, nous confie le père Pierre Belhache, curé de la paroisse de 2005 à 2011 et désormais à Saint-Sever-Saint-Clément de Rouen. Il ne renonçait jamais à une tâche ».
Selon le père Auguste Moanda, actuel curé, il vivait une spiritualité ordinaire, de sensibilité « conciliaire » : « Je ne l’ai jamais vu en col romain », souligne par exemple le père Auguste. « ll vivait dans le presbytère à côté de l’église Saint-Étienne. C’était une personne d’une grande simplicité », se souvient encore le père Pierre Belhache. « Il n’y avait pas d’envolées au cours de ses homélies, décrit une paroissienne. Il se mettait à la portée de tous et restait proche des textes. »
Marqué par la seconde guerre mondiale, « il souhaitait ardemment que la paix s’installe durablement sur notre continent », ajoute le père Auguste. Il entretenait aussi de bons liens avec la communauté musulmane de la commune, sans toutefois être directement engagé dans les instances de dialogue islamo-chrétien. Mohamed Karabila, représentant du Conseil régional du culte musulman, a salué « un homme de paix, défendant une conception apaisée et ouverte de la religion ».
Fidèle à ses convictions, le père Jacques Hamel invitait dans sa dernière lettre paroissiale de juin 2016 à faire des vacances « un temps de prière ». « Prions pour ceux qui en ont le plus besoin, pour la paix, pour un meilleur vivre ensemble, écrivait-il. […] Puissions-nous en ces moments entendre l’invitation de Dieu à prendre soin de ce monde, à en faire, là où nous vivons, un monde plus chaleureux, plus humain, plus fraternel. » Des mots qui sonnent aujourd’hui comme le testament d’un homme de foi et de dialogue.