Sciences et religions à l'époque contemporaine XIXe - XXe siècles

Nasr Hamid Abou Zayd : de l'étude du langage à l'interprétation du texte coranique

Abou Zayd propose, lui aussi, une relecture des « Sciences du Coran » qui distingue le « texte sacré » des circonstances objectives de son apparition. Il s'appuie, pour ce faire, sur la notion de « concept du texte » qui montre que celui-ci est en perpétuelle interaction avec son environnement. Reconnaître cette réalité, explique-t-il, permet deux processus d'interprétation : le premier est direct, il vise à extraire la signification et le sens en matière religieuse ; le second est indirect, il est lié à d'autres domaines scientifiques que celui des « sciences religieuses ». Si on s'accorde sur le fait que le Coran, dans sa globalité, est un produit culturel indépendamment de sa « source divine » professée par les musulmans, il peut donc être soumis, comme tout texte, à des méthodes modernes de lecture comme l'herméneutique et la sémantique, car il est indissociable d'un système linguistique culturel particulier. Ceci fait de la langue, ainsi que de l'environnement culturel, une référence pour l'explication et l'interprétation du Coran.

La démarche de Nasr Hamid Abou Zayd se réfère, de manière explicite, aux études de la seconde moitié du XXe siècle sur les textes de l'apôtre Paul dans la Bible des chrétiens. Dans ce domaine, les exégètes ont utilisé les ressources de la philologie, de la linguistique, de la critique textuelle, de la théorie littéraire et des genres littéraires, pour ouvrir un dialogue constructif et humain entre le texte, l'être, l'histoire et l'humanité. Les travaux proposés par Abou Zayd suivent cette perspective, ils ont comme point de départ la conviction que le Coran ne peut bien être compris qu'en le considérant comme partie intégrante d'une culture active à laquelle il appartenait, comme texte devenu –en quelques années- dominant dans la culture, puis comme texte ayant dépassé son cadre culturel pour influencer d'autres « cultures ». C'est ainsi qu'Abou Zayd considère que reconnaître la présence du texte dans la culture a des conséquences autres que reconnaître simplement sa présence dans les émotions des croyants et fidèles musulmans. Pour cette raison il ne voit pas de contradiction entre l'application de l'approche linguistique du Coran et la foi en sa « source divine ».

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