La bataille d'Actium sur le bouclier d'Enée, décrite par Virgile

Au centre de ces figures se déployait à perte de vue l'image d'une mer agitée toute d'or, mais sa teinte sombre se rehaussait de crêtes blanches et tout autour, en cercle, de clairs dauphins d'argent balayaient la mer de leurs queues et fendaient la houle. Au milieu on pouvait voir des flottes de bronze, la guerre d'Actium, Leucate tout entier bouillonnant sous l'appareil de Mars et les flots resplendir des reflets d'or. D'un côté, Auguste César conduisant au combat les Italiens avec les Pères et le peuple, les Pénates et les Grands Dieux, debout sur la haute poupe ; deux flammes jaillissent de ses tempes radieuses, l'astre paternel apparaît au-dessus de sa tête. Non loin, avec l'appui des vents et des dieux, Agrippa, fièrement, conduit le corps de bataille ; il porte l'insigne de la valeur guerrière, la couronne navale brille sur son front hérissé des rostres. De l'autre côté, avec une profusion barbare et des armes bigarrées, Antoine, ramenant ses victoires depuis les peuples de l'Aurore et les rivages Rouges, traîne avec soi l'Egypte, les forces de l'Orient, Bactres tirée du fond de l'univers ; misère ! une épouse égyptienne le suit.

[...]

Des dieux monstrueux mêlés de de toutes natures, l'aboyeur Anubis, pointent leurs traits contre Neptune et Vénus et contre Minerve. Entre les combattants, Mars déploie sa rage, il est ciselé en fer, et les sinistres Furies venues de l'éther ; joyeuse, la Discorde va et vient, sa robe déchirée, Bellone la suit, avec son fouet sanglant.

A cette vue, l'Apollon d'Actium tendait son arc, d'en haut ; tous alors, épouvantés, l'Egypte, l'Indien, les Arabes tous ensemble, tous les Sabéens s'enfuyaient.

Virgile, Enéide, VIII, 471-688 ; 698-706

(trad. J. Perret, CUF, 1978)

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